WHITE NOISE // An Electric Storm (Island Records)

Que font deux techniciens de la BBC (Delia Derbyshire & Brian Hodgson ) lorsqu'ils s'emmerdent entre deux jingles produits pour Radiophonic Workshop & quelques génériques pour la télé? Eh bien ils enregistrent ces fameux sons jamais entendus par les humains (« Many sounds have never been hear – by humans: some sound waves you don't hear – but they reach you. »). 1969 n'est pas une année érotique mais bel & bien électronique. L'une des plus grande perte que l'on doit au cd, outre l'esthétique froide & plastique d'un objet autrefois chaleureux, c'est la disparition formelle qu'apportaient les deux faces du vinyle. Ici elles remplissent un rôle essentiel, voire indispensable. Bien que l'on soit déjà dans un univers barré, totalement psychotropique, la face A présente des morceaux assez ludiques d'une pop électronique farfouillant tout le potentiel que les machines des studios de la BBC pouvaient fournir au duo (voir les mp3). On est en 69 donc & les sons qu'on entend pourraient bien être ceux d'une quantité de groupes expérimentaux/electro actuels qui savent bien (ou qui font semblant de ne pas savoir) ce qu'ils doivent à White Noise. Boucles hypnotiques, « effets stéréoscopiques » selon Julien Bécourt, rires de femmes, râles d'une jouissance sexuelle sans équivoque (My Game of love) le tout sans une seule guitare. Je l'ai déjà dit, nous sommes en 1969 & pas de guitare... c'est bizarre. Pour peu qu'on ait picolé ou fumé juste avant d'envoyer la galette le trip est assez ensorcelant. Même sans d'ailleurs. La mélodie est là, ce qui ne gâche rien. Puis arrive la face B & alors c'est le bordel intégral. Le gentil (mais néanmoins étrange) délire bascule vers l'intriguant, l'inquiétant, voire le flippant. On se rend compte qu'il n'était absolument pas nécessaire de se « mettre en état » - mais bon, comme qui dirait: il est trop tard. Ben tant pis. Le disque tourne (pas très rond), la fête psyché est finie, on n'aimerait bien comprendre ce qui se passe. Les gémissements s'étirent en cris d'angoisse, The Visitation annonce la couleur & elle est sombre. Les éclairs de la pochette prennent toute leur dimension spectrale. L'orage électrique continue avec The Black Mass, véritable B.O. de film d'horreur qui cavale dans nos veines & vient rendre visite à notre lobe temporal (aka le cortex auditif primaire). Mais c'est pas grave. Rien à foutre. Parce que voilà l'album qui annonçait déjà toute l'electro d'aujourd'hui.. White Noise c'est peut être la face sombre d'une musique expérimentale qui défriche sans cesse les possibilités d'une production en pleine émancipation, car c'est bien un album de production & White Noise est avant tout un groupe de studio. On pouvait s'en douter. La même année les Silver Apples sortent leur deuxième album. Un an auparavant ils avaient lâché leur bombe simeonesque. Island Records vient tout juste de ressortir une version remasterisée de l'album. Je ne saurais trop vous conseiller de vous la procurer.

White Noise - Love Without Sound
White Noise - My Game of Love

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